« Nous sommes les héritiers de saint Benoît, patron de l’Europe »

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Dans son discours du 25 octobre 2022, Giorgia Meloni, la nouvelle présidente du Conseil italien, a fait référence aux racines chrétiennes de l’Europe en affirmant : « Nous sommes les héritiers de saint Benoît, un Italien, patron principal de toute l’Europe ». Saint Benoît de Nurcie (480-547) fut proclamé patron de l’Europe par Paul VI, le 24 octobre 1964. Et Benoît XVI, lors de sa première audience générale le 27 avril 2005, a déclaré qu’il avait choisi le nom de Benoît en l’honneur de son prédécesseur Benoît XV mais aussi pour évoquer la figure extraordinaire du grand « Patriarche du monachisme occidental », saint Benoît de Nursie, qui « constitue un point de référence fondamental pour l’unité de l’Europe et un rappel puissant des incontournables racines chrétiennes de sa culture et de sa civilisation ». Saint Benoît en effet, peut, à l’instar de Charlemagne, être considéré comme le père de l’Europe chrétienne, le père de cette Europe dont l’Eglise ne cesse de rappeler les impérissables racines.

Il faut souhaiter que le nouveau gouvernement, dans son action, s’inspire réellement, de l’esprit de saint Benoît. Giorgia Meloni, présidente du Conseil depuis le 22 octobre 2022, devra tenir compte du contexte international et européen. Celui-ci laisse, en réalité, bien peu d’autonomie à notre pays, puisque, depuis le traité de Maastricht, les états nationaux se sont vu dépouiller d’une grande partie de leur souveraineté. La présidente du Conseil devra garder à l’esprit la force de frappe médiatique des « pouvoirs en place » et les tiraillements internes des diverses familles politiques réunies dans une coalition de centre droit. Comme tout homme politique elle peut faire ce qui est concrètement possible, sans renoncer aux principes fondamentaux qui la guident. De tous les gouvernements possibles, celui-ci semble bien le meilleur : c’est le premier gouvernement de droite et conservateur de la République italienne depuis sa fondation. Silvio Berlusconi, à qui revient le grand mérite d’avoir arrêté l’ascension communiste en Italie en 1994, était et reste un libéral au sens européen du mot, mais il s’est toujours défini lui-même comme un homme du centre, plutôt que comme un conservateur. Giorgia Meloni est une femme de droite, élue en 2020 à la présidence des Conservateurs européens, un groupe axé sur la défense de la souveraineté des états nationaux, le contrôle de l’immigration clandestine, la fin d’une imposition arbitraire et oppressive, le refus d’idéologies comme celle du genre. A ce groupe appartient le parti Droit et Justice (PiS) qui gouverne la Pologne. Et tout laisse penser que, pour la politique internationale aussi, Georgia Meloni suivra la ligne du premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, plutôt que celle du premier ministre hongrois Viktor Orbán. « Nous ne céderons pas aux chantages de Poutine », a-t-elle déclaré sous les applaudissements, lors de son discours du 25 octobre qui lui a obtenu la confiance de la Chambre des Députés.

Dans son premier discours en tant que présidente du Conseil, Giorgia Meloni a exposé une vision de la société, fondée sur les valeurs de la tradition occidentale et européenne. Entreprises et familles sont au centre de son programme-manifeste. Les entreprises recevront plus d’aides par le biais de la diminution des taxes et d’un soutien aux investissements qui servent au développement économique du pays. La famille représente « le noyau premier de nos sociétés, berceau des sentiments et creuset où se forme l’identité de chacun de nous. C’est pourquoi, a-t-elle ajouté, nous voulons la soutenir et la protéger et, avec elle, soutenir la natalité qui, en 2021, a enregistré son chiffre le plus bas depuis l’Unification italienne, pour sortir de de l’hiver démographique ».

A propos de l’immigration, elle a déclaré que le gouvernement veut arrêter les entrées illégales et démanteler le trafic d’êtres humains en Méditerranée. Sur l’environnement, elle a précisé sa position en ces termes : « il n’y a pas d’écologiste plus convaincu qu’un conservateur, mais ce qui nous distingue de certain environnementalisme idéologique, c’est que nous voulons défendre la nature avec l’homme qui l’habite ». Giorgia Meloni a cité une phrase de Roger Scruton, « un des plus grands maîtres de la pensée conservatrice européenne », pour qui « l’écologie est l’exemple le plus suggestif de l’alliance entre ceux qui vivent, ceux qui ont vécu et ceux qui viendront après nous ». « La protection de notre patrimoine naturel, poursuit-elle, nous engage au même titre que la préservation du patrimoine de culture, de traditions et de spiritualité que nous avons hérité de nos pères pour pouvoir le transmettre à nos descendants ».

Le nouveau président du Conseil a conclu son discours sur ces mots : « Le jour où notre gouvernement a prêté serment entre les mains du Chef de l’Etat, on célébrait la mémoire liturgique de Jean-Paul II, pape, homme d’état et saint, que j’ai eu l’honneur de connaître personnellement. Il m’a appris une chose fondamentale que j’ai gardée précieusement : ‘La liberté, disait-il, ne consiste pas à faire ce que nous aimons, mais à avoir le droit de faire notre devoir’. J’ai toujours été une personne libre, je serai toujours une personne libre et, pour cela, j’ai l’intention de faire précisément ce que je dois ».

Ce gouvernement doit, en tout état de cause, faire face à une situation dramatique. L’Italie et l’Occident sont en guerre depuis le 24 février 2022. Une guerre hybride, certes, mais réelle, et qui n’a pas encore atteint sa plus forte intensité. Ses retombées peuvent être lourdes, non seulement sur le théâtre militaire, mais aussi au sein des diverses nations : elle menace la cohésion sociale qui assure leur survie et provoque des phénomènes de contestation, parfois violente. Mais la catastrophe politique et économique qui menace l’Europe, conséquence de l’invasion russe de l’Ukraine, avant d’avoir des causes géopolitiques, trouve ses racines dernières dans l’abandon par l’Occident de l’ordre naturel et chrétien. La conflagration de la guerre n’est que l’ultime aboutissement d’un processus historique aux origines culturelles et morales.

Il faut reconnaître que, sans une aide spéciale de Dieu, un changement de cap paraît humainement impossible. Cette assistance de Dieu s’obtient par la prière, qui nous permet de recevoir la grâce pour suivre la loi naturelle. La mission de l’Eglise et du Vicaire du Christ sur la terre est celle-là et aucune autre : rappeler les vérités salvifiques que le monde ignore ou méprise. En paraphrasant saint Alphonse Marie de Liguori qui disait « celui qui prie se sauve, celui qui ne prie pas se damne », nous voulons rappeler que si une nation retourne à l’ordre naturel et chrétien, elle se relève, si elle s’en éloigne, elle sombre dans le chaos.

Voilà bien la croisée des chemins où se trouve le nouveau gouvernement. Nous formons pour lui les souhaits les meilleurs et l’assurons de notre prière.